Ateliers de potiers antiques de Lyon
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Les productions de V atelier de la Muette
Martine GENIN, Armand DESBAT, Sandrine ELAIGNE, Colette LAROCHE et Bernard DANGRÉAUX
Méthodes d'inventaire et d'étude
Les productions sigillées représentent un fonds documentaire dont l'importance quantitative et l'état de fragmentation ont imposé certains choix dans les méthodes d'inventaire et d'étude.
En premier lieu, un recollage sur l'ensemble destiné à déterminer un nombre minimum de vases selon la méthode Arcelin-Pradelle, aujourd'hui couramment employée, a été exclu. Cette méthode qui a fait ses preuves et que nous utilisons à Lyon dans l'étude de mobilier stratifié et d'ensembles clos ne paraissait pas convenir ou se justifier pour l'inventaire et l'étude de productions d'atelier. Nous avons considéré qu'effectuer des comptages systématiques sur la totalité des fragments n'apporterait en effet rien de significatif tout en représentant une énorme perte de temps. Un premier travail a donc consisté à isoler les éléments identifiables, rebords et fonds, puis à classer les bords par groupes morphologiques (plats, assiettes, bols) et typologiques (service I, service II, divers) afin d'évaluer les fréquences respectives de ces groupes et types.
Mise en place du cadre de l'etude
Justification du choix des références typologiques
L'étude des productions sigillées de l'atelier nous a logiquement amenés à réfléchir sur la façon dont il fallait présenter le matériel : devions-nous bâtir de toutes pièces une nouvelle typologie propre à ce seul atelier, continuer de nous référer à des classifications existantes mais déjà anciennes et parfois contestables, ou bien encore utiliser
le Conspectus, typologie la plus récente dont l'usage tend à se généraliser aujourd'hui ?
Le travail effectué sur les productions de la Muette nous a assez vite montré que la typologie présentée dans le Conspectus ne pouvait guère être utilisée dans l'identification, l'étude et la présentation des sigillées lyonnaises. On observe en effet que les auteurs font table rase des classifications antérieures, et en premier lieu pour ce qui nous concerne, de celle que S. Loeschcke a établie en 1909 d'après la sigillée du camp de Haltern : ils tentent de justifier cette démarche en arguant du fait que ce classement est insuffisant et largement inadéquat.
La classification de S. Loeschcke en quatre services s'avère effectivement en partie inadéquate, et nous avons déjà eu l'occasion de la remettre en question, notamment pour les services III et IV (Genin, 1993). En revanche, l'abandon des services I et II, et à l'intérieur de chacun d'entre eux des séries A, B, C, ne semble pas se justifier, en particulier à Lyon, et cela même si on nuance ou si on conteste dans le détail les implications chronologiques de cet ancien classement. À cet égard, les exemples des formes 12 et 14 du Conspectus sont particulièrement significatifs : ces deux formes rassemblent respectivement les assiettes et les bols du « service I » au sens large, en mélangeant des séries morphologiques distinctes (IB, IC) et en présentant sur le même plan des variantes précoces, peu standardisées, des profils classiques ou bien encore des formes dont on sait aujourd'hui qu'elles furent sans doute produites exclusivement à Lyon.
À quoi servent de tels regroupements ? En quoi sont-ils censés faciliter l'identification de ces assiettes et de ces bols pour les non-spécialistes? Ne rendent-ils pas au contraire encore plus ardue l'appréhension du matériel comme production d'un atelier donné à une époque donnée obéissant à un programme précis et inscrit dans une logique commerciale ? Il nous semble que la tentative
Gallia 53, 1996, p. 1-249
© CNRS Éditions, Paris 1997